2010/12/12

When English pop talks about politic. (From Slate.fr)

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Read Brighton Magazine about it

«David Cameron, arrête de dire que tu aimes les Smiths, ce n’est pas le cas. Je t’interdis de les aimer». Le 2 décembre, l’ancien guitariste des Smiths, Johnny Marr, attaquait violemment sur son compte Twitter le Premier ministre britannique, qui a régulièrement affirmé ces dernières années son attachement au groupe de Manchester. Avant d’être suivi, quelques jours plus tard, par le chanteur du groupe, Morrissey, qui lui a apporté son soutien en reprochant notamment à Cameron, vingt-cinq ans après son album Meat is Murder («la viande, c’est un meurtre»), de pratiquer la chasse à courre.



Le 8 décembre, une députée travailliste, Kerry McCarthy, a profité des questions au gouvernement, juste avant un débat tendu sur l’augmentation des frais universitaires, pour interroger Cameron sur le sujet:

«Les Smiths sont le groupe étudiant par excellence. Si le Premier ministre l’emporte lors du vote de ce soir, quelle chanson pense-t-il que les étudiants écouteront: Miserable Lie ["mensonge lamentable"], I Don't Owe You Anything ["je ne vous dois rien"] ou Heaven Knows I'm Miserable Now ["Dieu sait à quel point je suis malheureux actuellement"]?


Réponse de Cameron

—Si je venais les voir, je n’aurais probablement pas droit à This Charming Man ["cet homme charmant"]. Si je venais avec le ministre des Affaires étrangères [William Hague, ndle], cela serait probablement William, It Was Really Nothing ["William, ce n’était rien, finalement"]»

Cette passe d’armes entre un Premier ministre et un groupe pop est loin d'être une première: entre fascination (généralement très brève), répulsion et récupération, le rock britannique et les occupants de Downing Street ont toujours entretenu des relations compliquées depuis les années soixante.

Petit florilège en vidéo.

Wilson (1964-1970, 1974-1976) et Heath (1970-1974)

Furieux du taux d’imposition de leurs royalties, les Beatles ne voulaient pas faire de jaloux: en 1966, sur Taxman, ouverture de l’album Revolver, les Fab Four flinguent équitablement les travaillistes et les conservateurs, le Premier ministre de l’époque («Ha-ha Mr. Wilson»), qui avait pourtant dragué l’électorat jeune en les décorant un an plus tôt de l’ordre de l’Empire britannique, et son futur successeur («Ha-ha Mr. Heath»). La chanson fera partie de celles adaptées en dessin animé par la télévision américaine.


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Quatorze ans plus tard, Wilson et Heath figureront également en «bonne» place au sein d’une galerie de Premiers ministres dans le clip du single Going Underground des Jam, qui démolit toute la classe politique britannique:


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«You choose your leaders and place your trust
As their lies put you down and their promises bust
You'll see kidney machines replaced by rockets and guns»

(«Vous choisissez les dirigeants où placer votre confiance/Et à mesure que leurs mensonges vous rabaissent et que leurs promesses se dégonflent/Vous voyez les appareils à dialyse remplacés par des fusées et des flingues»)

James Callaghan (1976-1979)

Trois ans plus tôt, les même Jam réservaient un traitement de défaveur au Premier ministre travailliste James Callaghan, confronté à une situation économique dramatique: «I think it’s time for truth, and the truth is that you lost, Uncle Jimmy» («Je crois qu’il est temps de dire la vérité, et la vérité c’est que tu as perdu, Oncle Jimmy»). C’est l’époque où le groupe déclare par provocation en interview être prêt à voter conservateur, une position qu’il fera plus que nuancer par la suite.

Margaret Thatcher (1979-1990)

La «Dame de fer» a été la reine incontestée du pamphlet pop, au point qu’on pourrait sans difficulté composer une compilation qui lui serait entièrement consacrée. Avec son versant guerre des Malouines: Shipbuilding de Robert Wyatt ou How Does it Feel to be the Mother of a Thousand Dead de Crass. La moquerie sur sa phrase-culte selon laquelle «toute personne prenant les transports publics après 30 ans devrait se considérer comme un raté»: Only Losers Take The Bus des Fatima Mansions. Les attaques personnelles: She Was Only A Grocer’s Daughter («Elle n’était qu’une fille d’épicier») des Blow Monkeys ou Tramp The Dirt Down d’Elvis Costello («Quand l’Angleterre était la putain du monde, Margaret était sa maquerelle»). Les espoirs placés dans sa démission: Stand Down Margaret de The Beat, Celebrate (The Day After You) des Blow Monkeys, She’ll Have To Go de Simply Red. Voire plus: The Day That Thatcher Dies de Hefner ou Margaret on the Guillotine de Morrissey («Les gens bien font un rêve merveilleux/Margaret sur la guillotine»), qui vaudra au chanteur une enquête de la police britannique.


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Mais s’il ne fallait garder qu’un morceau, à la fois pour sa qualité musicale, celle de ses paroles et sa valeur de symbole, cela serait sans doute Walls Come Tumbling Down du Style Council, groupe formé par Paul Weller après la séparation des Jam. En 1985, quand il publie ce single mobilisateur influencé par la soul Tamla-Motown, le chanteur est en train de créer avec d’autres protest singers (Billy Bragg ou le chanteur des Communards Jimmy Sommerville) le «Red Wedge», un mouvement visant —en vain– à convaincre les jeunes de ramener le Labour au pouvoir en 1987:

«Are you gonna realize the class war’s real and not mythologized
And like Jericho you see walls can come tumbling down!
Are you gonna be threatened by the public enemies no. 10
Those who play the power game
They take the profits —you take the blame
When they tell you there’s no rise in pay»

(«Quand allez vous réaliser que la guerre des classes n’est pas un mythe mais une réalité/Et que comme à Jericho vous pouvez voir des murs s’effondrer/Vous laisser menacer par les ennemis publics du numéro 10/Ceux qui participent aux jeux de pouvoir/Ils prennent les profits, vous laissent les reproches/Et vous disent qu’il n’y aura pas de hausses de salaires»)


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John Major (1992-1997)

Comparé à sa devancière, le dernier Premier ministre conservateur avant Cameron a peu intéressé les songwriters. Sous son mandat, on parla moins d’inspiration que de récupération, celle du concept de «Cool Britannia», la nouvelle vague de créateurs britanniques en musique (Blur, Oasis, Pulp, Supergrass...) ou dans d’autres arts (le cinéaste Danny Boyle, le styliste Ozwald Boateng, le plasticien Damian Hirst...). En 1996, Major lance ainsi: «Nos théâtres ouvrent la voie à Broadway, notre pop domine les ondes, nos défilés de mode dominent ceux de Paris».

La même année, son ancien ministre John Redwood publie dans le Guardian une tribune intitulée «Pourquoi j’aime la britpop», où il oppose la pop britannique aux Etats-Unis et «au vandalisme politique qui démolirait la Constitution et donnerait le pouvoir à Francfort ou Bruxelles». Et tente au passage de récupérer pour son parti les paroles du single Lucky You des Lightning Seeds («Everything’s blue now/How lucky you»), le bleu étant la couleur des conservateurs. Il s’attirera une réplique aigre du chanteur du groupe, Ian Broudie: «Je penche à gauche, mais que je pense que tous les politiques sont horribles, qu'ils s'appellent Tony Blair, John Major ou John Redwood. Je ne voudrais être enfermé dans une pièce avec aucun d'entre eux».


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Tony Blair (1997-2007) et Gordon Brown (2007-2010)

En 1996, Blair tente la même manoeuvre que les conservateurs vis-à-vis des Lightning Seeds avec Three Lions, un hymne composé pour l’Euro de football, en en modifiant le refrain original («Football’s coming home/Thirty years of hurt never keep us dreaming») pour un congrès de son parti: «Labour’s coming home. Seventeen years of hurt never keep us dreaming» («Le Labour est de retour. Dix-sept ans de douleur ne nous ont jamais empêché de rêver»). Un symbole de ses tentatives pour annexer la pop britannique pendant sa campagne électorale: il reçoit Damon Albarn de Blur à Westminster, fréquente les Brit Awards, écoute Oasis dans sa voiture de fonction, rappelle son passé de guitariste dans un groupe étudiant... Le retour de bâton viendra dès 1998 sous la forme d’une Une vengeresse du New Musical Express («Jamais eu l’impression de vous faire avoir?») et d’une série de chansons contre le New Labour, comme Cocaine Socialism de Pulp:


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«Well you sing about common people
And the mis-shapes and the misfits
So can you bring them to my party
And get them all to sniff this?
And all I'm really saying
Is come on and rock the vote for me»

(«Vous chantez sur les gens ordinaires/Les inadaptés et des exclus/Pourriez-vous les faire venir à mon rassemblement/Et leur faire sniffer ceci?/Tout ce que je vous demande est de venir et d'appeler à voter pour moi»)

En revanche, comme John Major, Gordon Brown inspirera moins les musiciens que le précédent locataire du 10, Downing Street, au point que le fait musical le plus marquant le concernant est sans doute Gordon Brown, une parodie du Golden Brown des Stranglers.

David Cameron (2010-...)

Si, à notre connaissance, l’actuel Premier ministre n’a pas eu droit à un pamphlet pop, il s’est vu consacrer une parodie d’un tube populaire avant même son arrivée à Downing Street.

(«Vous chantez sur les gens ordinaires/Les inadaptés et des exclus/Pourriez-vous les faire venir à mon rassemblement/Et leur faire sniffer ceci?/Tout ce que je vous demande est de venir et d'appeler à voter pour moi»)

En revanche, comme John Major, Gordon Brown inspirera moins les musiciens que le précédent locataire du 10, Downing Street, au point que le fait musical le plus marquant le concernant est sans doute Gordon Brown, une parodie du Golden Brown des Stranglers.

David Cameron (2010-...)

Si, à notre connaissance, l’actuel Premier ministre n’a pas eu droit à un pamphlet pop, il s’est vu consacrer une parodie d’un tube populaire avant même son arrivée à Downing Street.

En 2007, dans une émission satirique de Channel Four, l’humoriste David Bremner l’avait caricaturé en majordome chantant Common People de Pulp, évoquant au fil des couplets sa consommation de haschich à la fac ou la richesse parentale. Le refrain original —«I want to live like common people, I want to do whatever common people do»— était remplacé par «I've never lived like common people/I wouldn't what common people are»: «Je n'ai jamais vécu comme les gens du peuple/Je ne saurais même pas à quoi ils ressemblent».


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Jean-Marie Pottier


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